vendredi 19 février 2010

RETEX GRIPPE A H1N1 : "un échec ou un non-succès, sur les raisons duquel il convient de s’interroger"

Le site de l’Assemblée nationale vient de mettre en ligne le rapport fait par M. Jean-Luc Préel, député, sur la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe A (H1N1). Ce rapport est suivi par les débats de la commission des affaires sociales, qui ont eu lieu au cours de la séance du 16 février 2010.
Le débat et le vote à l’assemblée validant cette résolution ont été prévus pour le 24 février prochain.
De ce rapport et des débats, ressortent une fois encore :
  • le recours exorbitant au principe de précaution
  • la responsabilité des médias, qui ont entretenu à la fois des attitudes anxiogènes et de défiance
  • les doutes sur la pertinence objective des experts
  • le manque de pilotage de la crise, qui n'a pas permis d'en infléchir le processus.

Je vous mets ci-dessous quelques extraits :

EXTRAITS DU RAPPORT :
«
En France, la mise en œuvre du plan national de prévention et de lutte contre la pandémie grippale a conduit à arrêter un volet « prise en charge », avec l’acquisition d’importants moyens de protection : un milliard de masques chirurgicaux destinés aux malades, plus de 900 millions de masques de protection de type FFP2 pour les personnes particulièrement exposées, notamment les professionnels de santé, et enfin 33 millions de traitements antiviraux
La campagne de vaccination a été officiellement lancée par la ministre de la santé et des sports le 20 octobre dernier
Près de 11 000 lieux de vaccination ont été mis en place sur le territoire afin d’assurer cette vaccination collective.
Le nombre de personnes vaccinées, environ 5,6 millions, est resté cependant relativement modéré, notamment en proportion du nombre de vaccins acquis. Se pose donc aujourd’hui la question de la gestion des stocks de vaccins non utilisés.»

EXTRAITS DU DEBAT
« Mme Marisol Touraine :
pour quelles raisons a-t-il été décidé de proposer la vaccination à l’ensemble de la population et non pas seulement aux populations à risque ?
Les experts qui ont été consultés étaient-ils indépendants ? Dans quelle mesure la transparence a–t-elle été assurée ? Pourquoi les médecins ainsi que la vaccination en milieu professionnel ont-ils été écartés du dispositif ?

M. le rapporteur (Jean-Luc Préel) :
après la déclaration de pandémie, peu de personnes ont été vaccinées, ce qui constitue un vrai problème de santé publique et un échec ou un non-succès, sur les raisons duquel il convient de s’interroger, en vue notamment de préparer un plan plus efficace en cas de nouvelle pandémie.

M. Jean-Pierre Door.
comme d’habitude en France, on discute stratégie alors que la guerre n’est pas terminée.
L’heure n’est pas au ton accusateur, ni à la recherche de boucs émissaires, mais plutôt à la réflexion sur la meilleure réponse face à une pandémie et à un virus imprévisible, dans le cadre du principe de précaution, qui nous oblige probablement à exagérer la menace de manière excessive.
La crise a mis en lumière quelques difficultés au niveau de l’opinion publique comme au niveau sociétal.
Les dysfonctionnements constatés ne concernent pas, à titre principal, les décisions appliquées à partir du plan national. Il s’agit surtout d’une crise de confiance de l’opinion publique et d’un déni de la réalité du risque. Il serait trop facile de pointer du doigt la seule responsabilité des autorités sanitaires.
Les évènements se sont succédés de manière très complexe
Évitons donc de faire le procès de la prudence et de faire grief au pouvoir politique d’en faire trop plutôt que pas assez.
Je pense que tout responsable en charge de la politique nationale de santé aurait réagi de la même façon, en appliquant le principe de précaution et en prenant soin de la protection de la population.

Mme Jacqueline Fraysse
tout le monde sait qu’il est impossible de prévoir l’évolution d’une pandémie ou de connaître la virulence d’un nouveau virus et personne ne saurait être accusée de ne pas savoir lire dans le marc de café
le champ de la commission d’enquête est trop restrictif et omet de poser diverses questions quant au défaut d’instruments de pilotage permettant de faire évoluer les dispositifs mis en place

M. Michel Issindou
Il y a eu trois acteurs dans cette crise : les experts, les médias et les décideurs politiques.
Le principe de précaution n’a-t-il pas rendu les politiques trop frileux vis-à-vis des experts?

POUR CONCLURE :

Le 17 février, Jean-Pierre Door (UMP), député, et Marie-Christine Blandin (Verts), sénatrice, ont présenté à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) un rapport d'étape sur la mutation des virus et la gestion des pandémies (info récupérée sur WK Pharma)

Ils recommandent notamment l'élaboration d'un plan plus souple contre une pandémie grippale « modérée », prévoyant des mesures davantage proportionnées que le plan actuel, « trop rigide et conçu pour une situation extrême ». Il préconise aussi « d’envisager des phases intermédiaires entre les phases 5 et 6 [NdlR : phase d'alerte maximale], permettant des mesures davantage proportionnées et graduées ».Le rapport propose également la mise en place « d’un dialogue avec les professions de santé pour les associer à la définition des mesures du nouveau plan pandémie »

Dès que je l'aurai, je mettrai le lien vers ce rapport.

POUR ALLER PLUS LOIN

RAPPORT "Face à la grippe A(H1N1) et à la mutation des virus, que peuvent faire chercheurs et pouvoirs publics ? " (compte rendu de l’audition publique du 1er décembre 2009)

mes précédents billets sur le RETEX de la grippe A H1N1
RETEX GRIPPE A H1N1 : un "échec à méditer"
RETEX GRIPPE A H1N1 : audition de la ministre et des laboratoires par le Sénat
RETEX GRIPPE A H1N1 : commission d'enquête parlementaire et OMS
commission d’enquête parlementaire sur la grippe A H1N1
RETEX sur la grippe A H1N1 : première contribution de Patrick LAGADEC
Grippe A H1N1 et Principe de précaution
Retour sur la grippe A H1N1 : sur-réaction ou sagesse mal comprise ?

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